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Moi, mes souliers

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Moi, mes souliers (toujours lacés) comme ceux dont  Félix Leclerc a parlé dans sa chanson, ont beaucoup voyagé. Une fois que j’en ai adopté une paire, mes chaussures me suivent partout, dans mes errances ou mes trajets quotidiens. J’ai changé les semelles, les lacets et les talons de celles-ci de nombreuses fois. Les cordonniers ne réagissent pas tous de la même façon, à ma façon de marcher qui fait que les talons s’usent toujours du côté gauche. Certains, contents d’avoir trouvé une cliente en or, qui revient tous les trois mois, m’offrent des rabais pour me fidéliser. D’autres m’ont déconseillé parfois de refaire la semelle, croyant qu’elle pouvait tenir encore un peu. Récemment, un cordonnier de Nelson a refait le talon de mes chaussures en m’assurant qu’ils allaient tenir très longtemps. Je n’ai rien dit, car je sais que quel que soit le talon qu’on met sur mes chaussures, il est à refaire tous les trois mois. Lorsque j’y suis retournée, il y a quelque temps, c’est un cordonnier consterné qui a constaté que j’avais bousillé son travail. Incapable de se faire à l’idée de me revoir dans trois mois, il m’a suggéré, plutôt impatienté, qu’étant donné ma façon de marcher (son regard me disait que ce n’était pas les talons qui représentaient le problème, mais bien moi), il vaudrait mieux mettre des fers pour protéger le coin sensible des chaussures. Je me suis donc retrouvée avec des souliers ferrés, comme aux temps anciens. Mes talons vont durer un peu plus longtemps, sans doute pas aussi longtemps que l’espère le cordonnier, mais ils dureront quand même un peu plus.

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